NAJI HAKIM
NAJI HAKIM

Splendeur du Chant Maronite et Orgue

 

Un concert en Première Mondiale fut donné le 26 Octobre 1999, au Collège du Sacré-Cœur de Gemmayzé (Beyrouth), par l'ensemble vocal Cèdre du Liban, la soprano Ghada Chbeir, sous la direction du R.P. Louis Hage, en alternance avec des improvisations à l'orgue par Naji Hakim. 

A l'occasion des fêtes de Noël et à la mémoire du Dr Joseph Zaarour, un CD intitulé, Chants Maronites de la Nativité, avec des improvisations de Naji Hakim sur le Grand-Orgue de l'église de la Trinité de Paris, Chorale Notre-Dame-Du-Liban de Paris, dirigée par le, R.P. Wadih Al-Skayyem, Solistes : Ghada Chbeir et Adham Chalhoub, vient de paraître, aux éditions IFO en Allemagne. Il rencontre aujourd'hui un succès éclatant dans les milieux musicaux et dans les communautés maronites à travers le monde. 

Une réflexion s'impose quant à la signification artistique, culturelle, spirituelle et liturgique du chant maronite à une échelle universelle, tel qu'en a témoigné l'orgue, pape des instruments dans ses improvisations. 

Le chant syro-maronito-arabe est le résultat d'un choix et d'un perfectionnement qui a plus de deux mille ans. Expression millénaire d'une foi millénaire, trésor de notre patrimoine Libanais, c'est avec respect et amour que nous devons le faire vivre et le transmettre, comme nos ancêtres s'y sont activés. 

Ses mélodies aux tournures très anciennes imprègnent l'âme de leur matière sonore authentique aussi bien que de leur paroles. Aujourd'hui, comme hier, elles restent fières et inébranlables face aux esprits vacillants de nos sociétés, pénétrées par le doute ou conscientes de vivre un malaise profond. 

Bien pauvre et misérable celui qui ne voit dans le chant maronite qu'une "vulgaire tradition". La mélodie maronite est bien typée, comme l'est tout chant populaire authentique. La mélodie demeure la quintessence même de la musique : "C'est la mélodie qui fait le charme de la musique et qui est le plus difficile à créer" nous dit Joseph Haydn. 

Une œuvre d'un individu isolé, fut-il un Bach ou un Mozart, ne peut être comparée à une musique qui a su traverser des millénaires et qui est devenue tradition par la forge de plusieurs générations. C'est faire le parallèle entre l'architecture de Beiteddine et les Cèdres du Liban.


L'orgue est l'instrument de musique propre aux églises occidentales. Le signataire de ces lignes a eu la grâce de connaître la tradition maronite dans son enfance et la tradition romaine à Paris, en particulier ayant été l'organiste titulaire du Grand-Orgue de la Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre, de 1985 à 1993. 

Lors des deux événements évoqués ci-dessus, il a eu le grand privilège de paraphraser des chants maronites à l'orgue, dans un esprit de développement symphonique des motifs, modes, mélismes et rythmes offerts par les mélodies, de manière à souligner le contenu du texte littéraire. Debussy, Ravel, Roussel, Bartok, Stravinski, Falla ont adapté, eux aussi des matériaux thématiques ethniques, pourtant étrangers au tempérament égal, et en ont tiré, pour leurs propres œuvres, des couleurs typées qui ne renient pas leurs origines. 

A l'heure où les sociétés, écrasées par l'avancée du béton, polluées par les veaux d'or, perdent leurs racines, à l'heure où les cultures de plus d'une semaine sont bonnes pour l'échafaud, à l'heure où le monde devient un énorme mcdonald, à l'heure où la musique ne connaît plus que le synthétiseur et la mesure à deux temps, à l'heure où le chant grégorien gît dans les cryptes occidentales ou dans les chapelles latérales, à l'heure où la décadence de la musique liturgique triomphe aux maîtres-autels, "comme il est beau de voir courir encore des messagers de la bonne nouvelle". Ces messagers, expression vivante de l'âme maronite, c'est l'ensemble vocal Cèdre du Liban de l'USEK, la soprano Ghada Chbeir, ainsi que leur chef et doyen, le Révérend Père Louis Hage, à qui je tiens à exprimer ici toute mon admiration et ma profonde gratitude, dans le Christ. 

Que soit remercié enfin, le Très Cher Frère Bernard Hoheika, Directeur du Collège du Sacré-Cœur des Frères de Gemmayzé pour avoir accueilli le concert dans la chapelle du Collège.


Naji HAKIM 
Organiste Titulaire du Grand-Orgue de l'église de la Trinité, Paris, 
Professeur d'analyse au Conservatoire National de Région de Boulogne-Billancourt
Visiting Professor at the Royal Academy of Music, London



In : La Revue du Liban, Janvier 2000
 
 
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